21.8.15

1113 - Reprise des entraînements

Félix avait appris à faire confiance à son instinct (Aaä Gmorks)
1. Sinon, toi, ça va ?

J'ai eu beau tenter, on dirait que l'écriture bloguesque ne fait plus partie de mes envies/besoins/ressorts. Comme si je n'étais plus à la mode de moi-même. Mais bon, pour donner des nouvelles : tout va bien. J'alterne traductions, écriture et bricolage dans ma nouvelle maison/atelier ; j'ai appris à monter des parpaings et à peaufiner un roman, je fabrique des meubles et des petites histoires, j'ai l'impression que nous commençons à nous 6 à force de temps à former une famille.

Mes espoirs comme d'habitude sont de devenir l'écrivain du siècle (malgré mon léger mépris du terme "écrivain" et ma conviction que les siècles ne durent pas), de ne jamais cesser d'améliorer (mais quoi ? je l'ignore encore) et si possible euh, je ne sais pas, d'être un peu moins couillon ce soir en me couchant ?

Côté traductions, tu verras peut-être passer, avec mon autre nom, deux ou trois ouvrages assez passionnants inspirés des philosophies orientales, un roman jeunesse pas mal du tout et un peu plus tard un policier où je me régale. Je te dirai ça à mesure.

Côté édition, un roman à paraître (chez Denoël) en janvier - et maintenant encore je croise les doigts et tout ce que j'ai de croisable, superstitieux comme je suis - deux romans jeunesse en projet, plus une piste de collaboration avec une grande dame de la littérature jeunesse. Le ouikend en quinze, tu me trouveras à Lauzerte, comme les années précédentes ; un peu plus tard, il y aura un site, surtout axé sur la littérature jeunesse.

Bref, je serai amené à utiliser ces pages pour, encore et toujours, l'information autopromotionnelle. Pas fascinant pour toi, je suppose, mais ça te parlera des eaux où je cabotine. Passons à autre chose.

2. J'ai lu

Au fond, j'ai du mal avec la rentrée littéraire. Je regarde tous ces noms avec l'oeil du renard de la fable - trop vantés et bon pour des goujats. La vérité, c'est sans doute pas mal de jalousie pour tous ceux que je ne suis pas et de panique devant la somme de tout ce que je n'ai pas lu.

Du coup, une ou deux fois dans l'année je m'autorise une orgie de lecture - commençant souvent par une longue après-midi dans les rayons d'une bonne librairie. Pour rattraper un peu de tout ce que j'ai raté, tomber par hasard (ou grâce aux conseils éclairés d'un libraire) sur une pépite, me tenir au courant des écrits des auteurs que j'aime. C'est ma sortie littéraire, en quelque sorte.

Cet été, ce fut Céline Minard et son délicat western Faillir être flingué. J'ai longtemps raffolé du genre au cinéma, et en particulier des variations sur celui-ci - Johnny Guitar, Little Big Man, Silverado ; et non seulement le souffle poétique de Minard m'a emporté comme ces épopées-là, mais j'ai adoré son travail à contrecourant de la tendance machiste inhérente au western. A toi de voir et de lire, si ce n'est déjà fait - j'ai voyagé à l'ouest, le coeur battant.

A l'ouest, il y avait aussi Les évaporés, de Thomas B. Reverdy, qui en plus de son initiale intercalaire louche vers les Etats-Unis* en puisant aux racines du polar et dans la littérature américaine - son personnage n'est autre qu'un double contemporain de Richard Brautigan, perdu au Japon pour enquêter sur une disparition, prétexte à une fugue mélancolique qui réunit les temps, les espaces et les histoires.

Il y a aussi eu Une faiblesse de Carlotta Delmont, de Fanny Chiarello. C'est en découvrant au Furet du Nord Si encore l'amour durait, je dis pas, un de ses premiers romans, que j'ai compris que
- Fanny Chiarello était un grand écrivain
- j'avais envie de faire comme elle (même si je n'avais pas vraiment idée de ce que ça voulait dire, la probabilité pour moi de vivre des amours lesbiennes et alcoolisées dans le Nord étant relativement faible).

C'est dire si je suis son oeuvre avec admiration - et c'est bien d'une oeuvre, tant son roman travaille le style, le point de vue et le mode de récit ; en plus de nous faire partager la brusque et énigmatique passion d'une cantatrice trop désirée par les hommes, Chiarello** parvient à faire revivre une époque - au sens littéraire du terme, mêlant avec brio les codes du roman du XXe siècle, du théâtre américain des années 50-60 et des conversations d'une rare authenticité.

Bref, et pour empesés que soient mes compliments envers ces trois auteurs et leur texte, je m'ai putain régalé et j'avais envie de t'en parler ; s'ils te tombent sous la main n'hésite surtout pas.

3. Nouvelles du front de la nouvelle 

Je t'ai parlé de Lauzerte, le meilleur salon de la nouvelle de tout le Sud-ouest et au-delà ; cette année, nous n'aurons sans doute pas le plaisir d'y croiser Pascal Arnaud, mon éditeur (et rééditeur) chez D'Un Noir Si Bleu, qui vient d'inscrire le mot "Fin" à une belle aventure qui a duré dix ans. Je sais ce que ces dix ans ont signifié d'efforts, de doutes, de travail et de sacrifices ; mais je préfère garder en mémoire les livres, les fêtes, les sourires et les joies des moments passés ensemble. Au revoir DNSB et à très vite, Pascal.

4. Tu parles d'un morceau

C'est donc comme reprendre le sport après la trève estivale : on est lourd et lent, les réflexes acquis rouillés par le manque de pratique. Donc, désolé pour ces phrases boursouflées, faut juste s'y remettre, pfou-pfou-pfou, on inspire par le nez et on souffle par la bouche, on serre les dents en se promettant que ça ne pourra qu'aller mieux la prochaine fois pourvu qu'on pratique avec régularité.

5. Sans titre

Ce con de silence 
se refuse à parler
A murmurer quoi que ce soit d'autre
Que le carillon creux dans le vent

une voiture passe

la lavande a très soif

- je n'entends rien

à ce que je voudrais dire.
  

* Ah oui, je m'ai acheté un nouveau portable pour écrire partout au lieu de traîner mes carnets ; mais tu peux me dire comment on tape Alt0102 quand on n'a pas de pavé numérique ?
** Je dirais Proust, Irving ou Reverdy, pourquoi je dirais pas Chiarello ou Minard, hein ? Vestige galant ou persistance machiste ?