31.8.11

980 - En attendant que l'imprimante

Bulle, l'été
1. Gueuloir, suite et fin

Ainsi, c'est terminé. Elle m'a lu (je me suis lu aussi, mais mon souffle semblait court, précipité, à peine capable de). Voilà, c'est comme ça, le sort en est jeté : ce presque roman, ce simili monstre, avec ses errances et ses envolées, partira d'ici la fin de la semaine vers les yeux des éditeurs. Que je commence, par avance, à détester, tu t'en doutes. Au cas où ils n'aimeraient pas, mais au cas, aussi, où ils en voudraient. Bref, contradictions et paradoxes, tout va bien, malgré tout. Au pire du pire du pire, j'aurai au la joie de l'entendre, elle, faire vivre les phrases dans la cuisine et le salon, de sa voix précise ; de m'être entendu nu dans sa bouche, et de n'avoir pas eu totalement honte de.

2. Recyclage

500 et quelques pages (verso, on est écolo ou on ne) viennent de filer dans le toner de mon. Un roman steam-punk et un guide de psycho, dans un anglais qu'il va me falloir traduire d'ici à. Voilà. Comme disait ma, je vis de ma plume. Pas celle dans le, l'autre. J'ai parfois encore l'impression d'être un élève anxieux, attendant la sanction de ses maîtres ; toutefois, pour la deuxième année consécutive, je ne rentrerai pas des classes, dans quelques jours. Mes journées de travail sont bien remplies, sans trop, surtout les jours où il y a, au choix, badminton, rugby, apéro, copains qui passent ; finalement, je suis déjà à la retraite. Pourvu que ça, et tout ce genre de.Situation professionnelle : heureux.
Sans compter que j'économise sur les fins de.

3. 1Q2011

C'est donc définitivement prouvé depuis hier : montrer son ne suffit pas. Même pas viré de facebook, même pas contacté par des admirateurs en, même pas lâché par des éditeurs qui. Pffff. Je suis déçu, moi qui voulais coucher pour.

4. De l'état du bordel du monde

J'hésite souvent, ces jours, à me lancer dans la diatribe, l'argumenté, le commentaire.
Mais après tout le monde, ce pauvre monde, ne va pas plus mal qu'il. Après tout, il y a tant de causes à défendre, tant d'injustices à réparer, que s'indigner ne sert pratiquement à. Après tout, j'ai le droit de vote, et quelques convictions, aussi vagues que solides (tu as déjà testé la solidité d'une vague, toi ?). Après tous ceux qui vitupèrent, ceux qui selon leurs propres mots tueraient pour être, sinon heureux, du moins satisfaits de leur sort, oublient qu'on ne peut se satisfaire ni se réjouir après qu'on a commis le.
Bref, vu d'ici, le monde passe, chaotique, incohérent, rempli des histoires que nous lui écrivons pour être certains d'exister.
Et c'est très bien comme ça.

5. Introducing, tout de même

Un modèle de lettre de présentation à joindre à un manuscrit (je vous dirai plus tard si ça marche ou pas) :


L’eau des rêves



Manu Causse - Roman

 

*

 

Au milieu des années 60, un homme se donne la mort dans une vigne. Trente ans plus tard, son petit-fils – le narrateur – s’aperçoit que sa bouche a disparu. Incapable de communiquer et de vivre, il s'enferme chez lui, dans son travail.

Dans ses rêves, le fantôme de son grand-père lui rend souvent visite. Lorsque sa grand-mère décède, le narrateur se rend en train à l’enterrement. Consciemment ou non, il rate son arrêt, et se retrouve perdu dans les collines. Providentielle, une jeune femme le prend en stop.

Après les obsèques, poussé par une vision, il s’ouvre enfin à sa famille de la colère qui le ronge : personne n’a parlé du suicide du grand-père, préférant le mensonge officiel de l'accident.

S’ensuit une plongée dans l'alcool et la drogue, une déconstruction de son existence qui l’amène à douter de tout, à quitter le monde des vivants pour devenir maçon, fou, ermite.

Mais la figure de la jeune femme croisée en auto-stop le hante. Pour la retrouver, il effectue à nouveau le voyage vers les collines, à la recherche de lui-même, de ses fantômes… et de l’amour.



Dans une langue scandée, liturgique, tripale, le voyage intérieur d’un homme habité par ses rêves et ses fantasmes, en quête de rédemption.

 

*

 

Manu Causse, né en 1972. Quasi-marié, zéro à quatre enfants selon les jours. Vit, écrit, respire à Toulouse. Traducteur et auteur de nouvelles (Visitez le purgatoire/emplacements à louer, Petit guide des transports à l’usage du trentenaire amoureux, Déjà que tout seul j’ai du mal à vivre ensemble, tous parus ou à paraître aux éditions D’un Noir Si Bleu), albums et romans jeunesse (Enfin Seule, Où sont les enfants, Roméo@Juliette, Fair-Play et Solo Rock aux éditions Talents Hauts), pièces de théâtre, spectacles musicaux et performances.  

Tu as vu ? Je n'ai même pas mentionné les blogs.Un peu la honte, quoi. Ca, et le mot "amour" à la fin du résumé. Enfin bon, c'est fait, on.


30.8.11

979. Lectures en proses

J'ai pas un peu grossi, Lannou ?

1. Lettre au proxy Lan14

Par la bande, j'apprends que le proxy d'Airbus refuse la lecture de ce blog à ses employés.
Je m'insurge. M'enfin quoi, ProxyLan14 (permets que je t'appelle Propro, ou Lannou), tu déconnes ou comment ? J'ai tenté de me souvenir de ce qui aurait pu provoquer ta colère ; alors bon, oui, il est possible qu'il y ait dans ces pages quelques photos de mes fesses, côte pile ou côté face ; il est possible que mon langage ne soit pas des plus soignés ; mais tout de même, bordel à fion de pute borgne, tu ne vas pas m'ostraciser pour ça, si ? J'ai connu des robots plus tolérants que toi.
Ou alors c'est ce très vieux post où je parlais de ton fameux plan Power 8, le joli nom d'huile moteur pour désigner une restructuration massive, synonyme de licenciements dûs à la gestion calamiteuse de certains projets ? Oh non, mon Lannou, ne me dis pas ça. Ce serait mesquin de ta part.
D'autant plus que, tu vois, je n'écris pas dans ces colonnes que désormais, les sous-traitants d'Airbus sont cantonnés dans des locaux plus ou moins insalubres, n'ont pas droit aux mêmes restaurants ni aux mêmes toilettes que tes employés, reçoivent des contrats de six mois même pour des projets qui durent plusieurs années et, de façon générale, sont tenus bien à l'écart des avantages acquis par tes employés... Non, mon proxynetou, je ne dis pas que tu t'es payé des employés à mi-tarif pour faire le même boulot qu'avant, pas plus que je n'insinue que les actionnaires doivent être bien contents, et le salaire du patron doubletripler grâce à ces substantielles économies réalisées sur les dos des salariés.
Si j'écrivais ça, alors bien sûr je comprendrais que tu m'en veuilles ; mais je me tais, je me cantonne, je ne fais mine de.
J'espère donc que cette grosse fâcherie entre nous va s'éteindre, et que tu me liras, mon proxynou, comme avant, quand tu m'aimais. Tiens, c'est pour toi que j'affiche cette jolie photo, voilà. Tu ne diras pas que je ne te soigne pas.
A très bientôt, et comme on dit dans ton langage, syntaxerror#212/vvck/eid/zob4 communication failed/danston.

2. Gueuloir

Tu sais ce qu'on fait, Elle et moi quand on a terminé un roman ? On se le lit à haute voix, en général en voiture, sur des routes qui s'effacent derrière les histoires. On repère nos petits défauts, on échange nos impressions... La semaine dernière, c'était La femme de Schrödinger, que j'ai aimé, beaucoup : cette musique à la fois complexe et directe, ces interrogations, ce personnage perdu au centre d'elle-même... A présent, c'est au tour de L'eau des rêves. Elle lit, ce qui est surprenant : ce n'est pas ma voix, ma grosse voix pleine d'accent que j'entends, mais la sienne, précise, mesurée, aiguë.
Je ne suis pas certain de passer l'épreuve du feu, et bien sûr je m'inquiète des réactions d'éventuels éditeurs. Je sais à quel point il est frustrant de rester lettre morte.
Une chose à la fois. D'abord, la lecture.
Je descends au salon avec une boule d'appréhension dans la gorge.


3. Mais où donc était passé 977 ?


Il était resté coincé dans l'ordinateur ; il traitait d'un billet de blog, probablement de mon pote CSP, et du massacre de ce début d'été. Il disait :

Je pinaille sur ce billet (?) que je trouve très juste, mais... si un excité d'extrême-gauche faisait péter une bombe sur le siège du FN ou autre, ne dirait-on pas qu'il y a été poussé par les envolées vidéogamesco-tronçonno-massacreuses que l'on trouve parfois dans les billets du camarade CSP ?
Je sais, lui reste sain d'esprit et parvient à établir une limite entre la pulsion du "qu'ils crèvent tous" et son assouvissement dans les faits.
Cela dit, on peut tenter de discuter avec un malade (même si, pour l'avoir fait, c'est terriblement complexe), et si un type veut me montrer sa bite dans la rue, je lui demanderais pourquoi il y tient. Avant d'appeler les secours si besoin est.
Alors mettons que oui, les blonds sont génétiquement condamnés à disparaître - parce que le gène de la blondeur est récessif, ce qui veut dire que soit il évolue soit il crève de consanguinité, tout comme les civilisations ne sont pas faites pour durer plus de quelques siècles - ce qui est tout de même mieux que nos corps périmés avant même d'atteindre la centaine d'années. S'en prendre à ces évolutions, c'est nier l'impermanence des êtres et des choses, l'effrayante beauté du changement. C'est, d'une certaine façon, se suicider. Mais un suicide qui fait plus de 90 morts, c'est une insupportable tyrannie, qu'il faut prévenir pour le futur.
Le degré de souffrance exprimé dans l'abondance des délires ultranationalistes est remarquons-le sans commune mesure à la souffrance réelle : nous sommes "envahis", "volés", "assassinés", prétendent ces commentaires, quand dans les faits ils sont installés avec un toit sur la tête, l'électricité et de quoi se nourrir.
Au mieux, les délirants se réfèrent à des statistiques, des théories, des projections, bien au chaud derrière l'écran de leur ordinateur. Mais leur refrain n'est qu'une variante de ce fameux "c'était mieux avant".
...

Ce que j'ai voulu dire ensuite, je ne m'en souviens pas. Cela dit, bon, c'est un exemple de prose politique, je suppose. Et de pourquoi je ne poursuis guère dans cette voie.


4. Et quoi d'autre ?

Non, mais imagine un instant que L'eau des rêves, tout comme Le garçon au bord du monde, se prenne râteau sur râteau auprès des éditeurs ?
Alors, la solution serait simple : arrêter d'écrire.
Ou commencer cet autre roman, dont le titre m'intrigue déjà, et réciproquement.




29.8.11

978 - S'y remettre (quelques nouvelles)

L'été bien, le gars.
1. Nouvelles : fins de romans

Certains soirs, je la retrouvais, noire, brûlée, devant son ordinateur. Desséchée, les doigts raccornis, elle respirait à peine.
Quand je l'embrassais dans la nuque, elle tressaillait ; revenait à la vie, graduellement. Je l'aidais à quitter son fauteuil, l'emmenais dans la cuisine, découpais des tomates, du pain, des melons. Peu à peu, elle redevenait elle-même.
Mais c'est terminé ; son roman est fini, achevé, envoyé ; il attend désormais de connaître sa destinée parmi les éditeurs, puis chez les libraires...
Quant à moi, mon rôle prend-il fin ?
Quelques corrections, encore, sur L'eau des rêves ; puis le calvaire des enveloppes, des envois, des refus, des attentes ; l'impression d'avoir enfanté un petit monstre, un banal handicapé (ou, certains soirs de lux/ur/e, une révolution, un roman, une oeuvre).
Bref, Elle et moi avons terminé nos romans. A présent quoi ? Deux recueils de nouvelles à défendre, entre salons, lectures, voire interviouzes ; la maison et nos nouveaux bureaux à aménager peu à peu. Oh, et quelque chose comme 1500 pages à traduire, à deux, d'ici à la fin de l'année...
L'automne sera travailleur ou ne sera pas.

2. Nouvelles : effets d'annonce


Le petit guide des transports à l'usage du trentenaire amoureux, donc, ressort chez D'un Noir Si Bleu, en concurrence directe avec le nouvel opus d'Emmanuelle Urien, Tous nos petits morceaux. Et où s'effectuerait le lancement, sinon au centre exact du monde de la nouvelle ? A Lauzerte, donc, pour Place aux Nouvelles, le dimanche 11 septembre 2011. Oui, juste dix ans après la mini-apocalypse mondiale, dont la déflagration résonne encore autour de nous. Qui sait ? Ce sera peut-être le lieu idéal pour changer le monde, un peu, pas à pas.

3. Nouvelles : au théâtre un de ces soirs


La fête à Fred devrait revenir sur les planches en novembre, à Toulouse (avant Tokyo, Anchorage, Coubisou et le reste du monde, espérons) ; je vous en dirai plus. Au même moment, dans une salle obscure, une comédienne rencontre régulièrement un metteur en scène autoproclamé pour un projet intitulé En attendant Daniel, qui se propose, rien de moins, que de mettre des mots sur le cri primal de la femme enfermée. Avec, je l'espère, une mariée en déambulateur, un strip-tease et un poisson rouge.

4. Nouvelles : la tronche du monde, en ce moment

Ouh putain... Tu sais que même à moi, il faut une foi ardente, l'air des montagnes, les calcaires des causses, le rire des enfants pour ne pas céder à ce qui ressemblerait à du pessimisme ? Mais les enfants ont ri, les montagnes se sont entrouvertes, les causses s'étendaient, fidèles, là où je les cherchais : l'été était, voilà. Ca ira pour cette fois.

5. Nouvelles : bonnes résolutions

Arrêter d'arrêter de ne plus fumer, bien sûr ; ne plus me disperser - ne plus faire de musique, pas plus de trois ou quatre projets en tout cas ; ne plus peindre, pas avant que l'atelier soit remis en état ; ne plus croire, ne plus rêver, ne plus bondir d'un pied vers l'avenir ; ne plus abandonner ce blog, ne plus me tuer à la tâche, ne plus me jeter vers les sourires des aventures, ne plus fuir.

À moins que, évidemment.